Portrait de femme dans la tech : Linh Tran

Linh Tran est Lead Data Intelligence & IA au sein du ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, à la Direction de l’immobilier de l’État. Après plus de quinze années passées dans le secteur privé, elle n’a pas simplement changé d’environnement, elle a déplacé son regard. Pour elle, la donnée n’est ni un outil neutre ni un simple support d’analyse. C’est une matière vive, traversée par les intentions, capable de relier les intelligences et d’ouvrir des voies nouvelles pour transformer les organisations.

Transformer pour rassembler

Dès les premières années de sa carrière, Linh perçoit que les données ne sont pas de simples chiffres, mais une forme de langage, capable de relier les mondes. “Très tôt, j’ai été convaincue que la donnée pouvait transformer le monde. Elle pouvait faire progresser nos organisations, et même nos sociétés.” Après plus de quinze ans passés à affiner son regard et ses compétences dans le secteur privé, elle fait un choix clair : mettre son expertise au service de l’intérêt général. Aujourd’hui, au sein du ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Linh pilote des projets de data intelligence et de valorisation des données avec une double exigence : faire de la donnée une force d’impulsion pour repenser l’action publique, et accompagner la transformation des organisations. Car pour elle, transformer une structure ne se résume pas à l’introduction d’outils ou à la production d’indicateurs. C’est un travail plus délicat, plus souterrain. “Le plus important est de trouver la stratégie adaptée à la culture de l’organisation, d’embarquer les équipes et de proposer des solutions alignées sur les véritables besoins métiers.”

Ouvrir la voie : une tech plurielle et engagée

Linh ne se contente pas de piloter des projets : elle participe à refaçonner les lignes mêmes de la tech, pour en faire un espace plus juste, plus attentif. Dans un secteur encore largement masculin, certaines injonctions persistent : “c’est un sujet d’homme”, “reste experte technique, laisse la stratégie aux autres”. Mais pour elle, la tech, et plus encore l’intelligence artificielle, réclame d’autres voix. Une pluralité de vécus, à toutes les étapes, du code aux décisions. Son propre parcours en témoigne. Venue du Vietnam à dix-huit ans, Linh s’est frayé une voie là où rien n’était balisé. “À mon arrivée, je n’avais ni réseau, ni modèle, et je ne parlais pas un mot de français. J’ai appris à les construire.” Ce qu’elle a bâti, elle veille aujourd’hui à ne pas le garder pour elle seule. Elle s’assure que les passages ouverts restent praticables pour que d’autres puissent à leur tour tracer leur chemin.

Un récit à réécrire

“Pendant longtemps, j’ai cherché la sororité. Et puis un jour, j’ai compris : c’est à moi de l’incarner.” Aujourd’hui, elle agit au sein de plusieurs collectifs, et porte un projet ambitieux pour une IA plus inclusive, un espace de réflexion et d’action pour faire bouger les lignes. “Attirer les femmes dans la tech est une première étape, mais il est important de leur offrir les moyens de s’épanouir, de décider et de façonner l’avenir. Cet engagement nécessite le soutien actif des hommes alliés et des entreprises partenaires.” Pour Linh, l’égalité ne se mesure pas seulement en chiffres, mais dans la capacité à exister pleinement, à exprimer librement ses compétences, sans avoir à justifier sa place. “Ce que je porte, c’est une vision d’équité où femmes et hommes, à compétences égales, sont reconnus à leur juste valeur.”